Les Belges dans la Bataille d'Angleterre

Après la guerre éclair de mai-juin 1940, le désastre de Dunkerque et la capitulation de la France, le monde entier était convaincu que l'Angleterre, seule, ne tiendrait pas longtemps devant les armées victorieuses de Hitler.
On attendait, mais avec beaucoup de scepticisme, une riposte britannique.
Dans la journée de 17 juin, Churchill avait reçu de Gaulle, partit de Bordeaux le matin même en avion et sans attendre, il mit la B.B.C. à sa disposition ce qui nous valut le célèbre appel du 18 juin, réponse en quelque sorte à l'appel dramatique du Maréchal Pétain prononcé la veille sur les ondes.
Au lendemain du 22 juin 1940, l'Angleterre se trouvait dans une situation extrêmement tragique. Hors de l'Empire ce fut l'absence complète d'appui.
Après la Pologne, la France avait été mis hors combat; la Belgique, les Pays-Bas, le Danemark et la Norvège occupés par l'Allemagne et l'Italie de son côté; le Japon en guerre avec la Chine ne dissimulait pas ses sympathies pour le IIIème Reich; l'Espagne pas très bienveillante et on pouvait se demander si Franco n'allait pas permettre aux troupes du Reich de traverser son territoire en direction de Gibraltar, et les pays balkaniques terrorisés et dociles, Grèce exceptée, aux signes de Berlin.
Aux Etats-Unis, le Président Roosevelt, antinazi convaincu devait compter avec le Congrès et une opinion publique résolument en faveur de la paix.


Ils étaient une poignée...

Les Belges rentraient chez eux après leur pénible exode, l'armée était prisonnière et l'aéronautique militaire avait cessé d'exister. C'est dans ce contexte qu'une poignée d'aviateurs refusa d'accepter cette situation et préférant le combat aux camps de prisonniers ou à l'inactivité, ils s'échappèrent, malgré les ordres qui le leur interdisaient, de France ou du Maroc pour rejoindre la Grande-Bretagne.
Certains parmi eux furent portés déserteurs et condamnés pour détournement de matériel militaire à des peines de prison, des amendes e à la destitution.
Cent vingt-quatre aviateurs et candidats furent ainsi groupés en Angleterre avant le mois d'août 1940. Vingt-neuf parmi eux étaient utilisables immédiatement dans les escadrilles du Fighter Command. Les autres devaient d'abord passer par un réentraînement réduit ou un entraînement complet avant de pouvoir penser au combat.
Comme il n'y avait aucune possibilité de constituer à cette époque des unités belges et la situation de guerre ne permettant pas le moindre délai, quinze pilotes belges furent immédiatement répartis entre les escadrilles de Hurricane du Fighter Command n° 87, 213, 32, 43, 145, 46 et 229.


Chasseur Hurricane



Ils étaient 29

Voici leurs noms:

M. BUCHIN
R. de CANNAERT d'HAMALLE
B. de HEMPTINNE
R. de HEMRICOURT de GRUNNE
F. de SPIRLET
G. DOUTREPONT
A. JOTTARD
D. LE ROY du VIVIER
R. MALENGREAU
J. OFFENBERG
V. ORTMANS
J. PHILIPART
E.SEGHERS
A. VAN DEN HOVE D'ERTSENRYCK
W. VAN LIERDE

Quatorze autres (pilotes, observateurs et mitrailleurs) furent répartis, après une courte adaptation sur Bristol Blenheim, entre les Squadrons 235 et 236 du Coastal Command. Voici leurs noms:

L. DEJACE
R.DEMOULIN
GIOVANNI DIEU
H. GONNAY
L. HEIMES
L. JAVAUX
J. KIRKPATRICK
H. LASCOT
O. LEJEUNE
A. MICHIELS
L. PREVOT
R. ROMAN
A. VANWAYENBERGHE
F. VENESOEN


Ils étaient 29... dès les premiers jours

Rappelons que tout ceci se passait à une époque où il n'était pas encore question de constituer un gouvernement belge à Londres ce qui ne sera fait qu'après la Bataille d'Angleterre.
Vingt-neuf aviateurs belges se trouvaient donc disséminés dans des escadrilles de la R.A.F. Intégrés au sein de l'aviation britannique ils travaillèrent aux côtés de leurs camarades anglais et alliés avec une ardeur et un cran que le commandement anglais a maintes fois reconnu par l'octroi de hautes distinctions.
Pendant cette mémorable période de l'histoire, nos compatriotes comme leurs camarades se dépensèrent sans compter, volant sans répit des heures entières, ayant tout juste le temps de se poser pour se ravitailler en munitions et en carburant et ne se nourrissant que d'une maigre collation, avalée en hâte entre deux missions.
La Belgique était donc présente dès le départ, dans le ciel d'Angleterre au moment où se déroula la formidable lutte dont l'issue changea le cours de l'histoire.
Il ne faut surtout pas oublier que si la Luftwaffe avait su obtenir la suprématie aérienne, l'invasion de la Grande-Bretagne aurait probablement réussi et l'Angleterre occupée à son tour.
Il n'y aurait jamais eu de débarquement en Normandie, ni de Libération des camps, ni de Libération tout court.
Vingt-neuf Belges ont donc pris part à la défense du dernier bastion de la Liberté.


Chasseur Spitfire



Leurs victoires et leur sacrifice

Vingt et une victoires confirmées et six probables sont inscrites à leur palmarès entre le 11 août et le 31 octobre 1940.
Sept d'entre eux y ont perdu la vie, deux autres furent grièvement blessés.

Six des sept tués Belges se trouvent sur le tableau d'honneur des aviateurs tués au cours de la Bataille d'Angleterre, parchemin déposé à l'abbaye de Westminster dans la chapelle érigée à leur mémoire et dont les vitraux reprennent les insignes des escadrilles.

Le plus jeune de ce groupe de braves trouva la mort au-dessus du comté de Kent le jour de la Toussaint 1940; il s'appelait de Cannaert d'Hamalle. Il avait 21 ans… et était arrivé le premier en solitaire le 20 juin à Plymouth avec un convoi de Polonais.


Sources bibliographiques et photographiques:
Article de G. Rens dans "Jours de Guerre" Editions du Crédit Communal de Belgique et dans le "Journal des Combattants" de 11/2000.