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Rss L'Honneur de la Belgique
"Saluez les Juifs au passage! Offrez-leur votre place dans le tram! Protestez contre ces méthodes barbares! Cela rendra les boches furieux."
C'est en ces termes que "La Libre Belgique" clandestine fait appel, en 1942, à la conscience des Belges. L'appel est entendu.

Le XXe convoi pour Auschwitz est arrêté, le 19 avril 1943. 231 déportés juifs prennent le large. Aucun n'est dénoncé. C'est l'honneur de la Belgique. En voici les moments forts.

En janvier 1943, une étrange euphorie règne sur l'avenue Louise à Bruxelles devant le n° 453, siège de la Gestapo.
L'immeuble a été attaqué par un pilote belge de la RAF, Jean Sélys de Longchamps. Et c'est là que tout commence.

Youra Livchitz ne peu détourner le regard de la façade détruite. Ce jeune médecin juif connaît le mystère de cet immeuble. Des amis, des résistants, y sont interrogés et torturés avant de disparaître en prison ou dans un camp de travail. Dans les caves, des femmes, des hommes, des enfants juifs, arrêtés au cours des rafles, attendent leur transfert dans le camp de rassemblement de Malines. Youra sursaute. Quelqu'un lui tape sur l'épaule: c'est Robert Maistriau, un ancien camarade de classe.
Comme l'est également le troisième membre du commando Jean Franklemon dit "Pamplemousse" qui sillonne les routes de Belgique avec "Les Comédiens routiers", futur Théâtre National.

Dans les caves, une jeune infirmière, Régine Krochmal, attend le bon vouloir des "preneurs de vie". Elle a été arrêtée pour distribution de tracts antinazis à la Wehrmacht. Simon Gronowski n'a que 11 ans. Il sera dans le XXe convoi. Lui, Robert et Régine se souviennent (voir encadré).
L'étau se resserre sur les Juifs, les apatrides d'abord, les Belges ensuite pourtant protégés de la reine Elisabeth. Port de l'étoile jaune, mise sous séquestre des biens, enregistrement obligatoire, seule manière d'avoir des tickets de ravitaillement etc. Une "évacuation" vers la Pologne est en cours.

Le 25 juillet 1942, les 55 disposent d'un registre complet d'environ 56.000 candidats à la mort, 30.000 y échapperont, cachés par des Belges.

Les malheureux destinataires apprennent par courrier qu'ils doivent se pésenter "immédiatement" et arriver dans la matinée du jour fixé au Centre de rassemblement de Malines.
Le 27 juillet, les premiers "rassemblés" débarquent caserne Dossin. Ils ont dû se pourvoir d'un "trousseau" dérisoire: ravitaillement pour 15 jours en vivres non périssables, 1 paire de souliers de travail, 2 paires de bas, 2 chemises, 2 caleçons, 1 vêtement ou robe de travail, 2 couvertures de laine, 2 draps, 1 gamelle, 1 gobelet, 1 cuillère, 1 chandail".
Le superflu leur est confisqué.

Tout est fait pour maintenir la fiction d'une déportation au travail. "La terrible réalité de cette lugubre salle d'attente de l'holocauste ne permet aucun rêve. Des châlits de bois grossier sur deux étages servent de lit. Le petit Simon s'amuse à sauter de l'étage supérieur, comme il saute d'ordinaire d'une plate-forme de tram. Exercice salvateur. Au milieu des dortoirs, deux tables où les chefs de chambrée déposent des pots de bouillon noir, ersatz de café et 250 g. de pain par jour, une cuillerée de confiture, une de sucre, le matin. À midi, une gamelle de soupe aux choux. Le soir, les restes de cette lavasse. Le pain est une monnaie d'échange. Pour du pain, on trompe, on trahit, on vole. On peut reconnaître ceux qui ne reçoivent pas de colis de l'extérieur à leur visage hâve et à leur pas traînant.
Sur les marches de l'escalier séparant deux dortoirs de même taille se trouvent, pour 100 personnes, deux récipients de fer qui servent de pots de chambre. Il n'y a pas d'eau courante, mais d'autant plus de vermines qui tourmentent les détenus. Au rez-de-chaussée, les salles de douche avec des éviers primitifs et des toilettes, environ dix latrines puantes. Les gens font tous les matins la queue devant ces "toilettes réservées aux Juifs".
Le commandant du camp est un homme redouté dont l'arme la plus terrible est Lump, le chien-Ioup. Un détenu est amputé suite à des morsures.

Un peuple de musiciens, de poètes, de philosophes peut-il perpétrer un génocide ?

Pour les Belges, la réponse est non. Mais la vérité commence à percer dans les rangs de la Résistance. Elle désespère Youra qui en fait partie. Des hommes s'enfuient du XIXe convoi. Dorénavant, le voyage vers Auschwitz se fera en wagons à bestiaux scellés. La répression s'accroît. Elle envoie à Malines de nombreux résistants juifs qui refusent de se laisser embarquer comme des moutons. Pour s'évader, il leur faut des outils pour venir à bout des lucarnes et de leurs barbelés, des barres de fer des portes.
Les candidats chapardent et reçoivent discrètement des billets de 50 FB pour un transport en commun. Les rebelles se préparent en silence tandis que Youra cherche des appuis pour mener son plan d'attaque à bien. Il est rendu possible par l'allure d'escargot adoptée par les cheminots belges dans ce type de convois.
Mais l'armée blanche, récemment très éprouvée, estime le projet trop risqué. Ceux du XXe convoi devront agir seuls. Youra persuade alors Robert Maistriau et Jean Franklemon de lui prêter main-forte.

Le 19 avril 1943, 1.631 Juifs dont 262 enfants, attendent leur déportation. Le plus âgé a 90 ans. La plus jeune détenue a vu le jour dans la caserne. Elle n'atteindra que 6 semaines de vie".
Maistriau dépose sur les voies une lampe-tempête garnie d'un papier rouge. Le train obéit au signal et stoppe. Youra tire sur l'escorte pour détourner son attention. Les deux autres réussissent à ouvrir les portes. Dirigé par sa mère, Simon saute. Régine sort par la lucarne d'un autre wagon. "Plusieurs des évadés se retrouvèrent à l'aube sur le quai de la gare de Haecht. Certains se reconnaissent et n'osent se regarder, encore moins se parler. Sur la plate-forme d'un tramway bruxellois, obéissant comme à un ordre muet, des ouvriers encerclent ce matin-Ià deux fugitifs et les protègent des regards curieux."

Épilogue
Youra est fusillé à Breendonk le 17 février 1944.
Jean Franklemon survit à Sachsenhausen et Maistriau à Buchenwald.
Régine a toujours refusé de dire ce qui lui est arrivé lors de sa seconde arrestation pour nouveaux faits de résistance. Simon est libéré le 3 septembre 1944.
Robert Maistriau
"J'ai fait ce que j'ai pu, c'est-à-dire peu de choses: arrêter le train, forcer le wagon, dire aux gens de s'enfuir. Je regrette simplement qu'il ait fallu si longtemps pour que cette histoire soit tirée de l'oubli et aussi de n'avoir pu rencontrer qu'une seule personne de celles que j'avais sauvées."
Simon Gronowski
"Avoir pu sauter du train si jeune relève du miracle. Il m'a permis de devenir père et grand-père. Mais j'étais seul, ayant perdu toute ma famille. Pendant 50 ans, j'ai voulu oublier tout, vivre pour le présent et l'avenir. Maintenant à cause du livre, cela me revient et, quelque part, cela m'est pénible."
Régine Krochmal
"Pendant des années, je me suis efforcée de ne pas me souvenir. Aujourd'hui, c'est impossible car je suis très en colère contre les hommes. Ce sont eux qui font les guerres. Et je voudrais dire aux femmes qu'il faut cesser d'être leurs complices et d'envoyer leurs enfants à la mort. Peu importe la cause à défendre. Il n'y a que le cœur qui compte."


Cour de la Caserne Dossin


Source : article de Viviane Bourdon dans le magazine "Telepro" du 28/02/2002 via mon ami Francis Deleu.
 
 
Note: 5
(1 note)
Ecrit par: prosper, Le: 28/05/11


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