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Par Bauwens




Le canal de Schipdonk , officiellement appelé , Dérivation de la Lys .
Le canal de Schipdonk traverse la province de Flandre orientale et l [Suite...]

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Rss Un aviateur dans la Résistance

Paul Henry de la Lindi naît à Mons le 16 février 1906. Sa jeunesse est imprégnée de l'exemple d'un père, soldat inflexible et courageux ; le général chevalier Josué Henry de la Lindi doit en effet son titre à la magnifique conduite qu'il eut lors des campagnes antiesclavagistes, aux premiers temps de l'Etat indépendant du Congo.
Venant de l'Ecole des Cadets, Paul est admis en décembre 1925 à la 71° promotion Infanterie-Cavalerie de l'Ecole Royale Militaire. Nommé sous-lieutenant le 26 décembre 1927 à la sortie de l'école, il est désigné pour le 10° Régiment d'infanterie à Arlon. Il ne reste que quelques mois dans cette arme.
Tempérament audacieux, aimant le risque et l'imprévu il passe, à sa demande, à l'Aéronautique militaire. Très rapidement il obtient les brevets d'observateur et de pilote.
A la mobilisation de 1939, le capitaine Henry de la Lindi commande la 11° escadrille d'observation, dite " Les Sioux rouges " stationnée à Bierset près de Liège. Elle disposait d'avions Renard 31, les plus vieux appareils de l'armée belge, en service depuis 1934, d'une vitesse au sol de 230km/h et de 290 km/h au régime maximum à 4000 mètres d'altitude, armés d'une mitrailleuse de capot et d'une mitrailleuse de tourelle de calibre 7,65 mm.
On l'appelle " le Père " afin de le distinguer du lieutenant Albert Henry également dans son escadrille et que l'on a baptisé " le Fils ". C'est un homme maigre, au regard incisif et au sourire en coin qui ne l'abandonne jamais, même quand il est furieux.
Ne disposant que d'appareils aux possibilités dépassées, privé le plus souvent de la protection de la chasse amie à laquelle leur emploi était subordonné, il ne se laisse pas abattre par ces circonstances difficiles qui tempèrent et refroidissent à juste titre l'ardeur des équipages. Possédant au plus haut degré le sens du devoir et la passion de son métier, il fait preuve dans les moments difficiles du plus bel enthousiasme et du plus magnifique allant.
Définissant les conditions de vol appropriées aux circonstances imprévues et la tactique d'emploi qui en découle, payant de sa personne et, aux moments critiques, acceptant pour lui les plus grands risques, il obtient de son personnel le maximum. A l'exemple de leur chef, tous les équipages furent également courageux et habiles, remplissant sans protection ni soutien trente et une missions de reconnaissance et de recherche de renseignement, conduisant leurs appareils d'étape en étape jusqu'au bout de la guerre sur le sol national.
Au terme de la campagne tragique des " 18 jours ", les " Sioux rouges " du capitaine Henry de la Lindi ont fait leur devoir jusqu'au bout.
L'escadrille a été citée à l'ordre du jour de l'armée le 27 mai 1940 :
'' Pour l'héroïsme et l'habilité avec lesquels ses équipages décimés ont exécutés du 10 au 26 mai 1940, sans aucune protection de chasse et en présence d'une aviation et d'une DTCA ennemie redoutables, les nombreuses missions de reconnaissance qui leur ont été demandées ''
Le 28 mai 1940, le capitaine Henry de la Lindi qui dispose encore de sa voiture personnelle, fort abîmée par les bombes et qui échappe ainsi aux réquisitions des Allemands, réussit avec quelques camarades à faire mouvement vers Bruxelles, à échapper aux barrages et à rejoindre son domicile.


L'évasion de Belgique.

Paul Henry de la Lindi échappe à la captivité et travaille dans un bureau à Bruxelles. Mais pour lui la guerre n'est pas finie. La bataille d'Angleterre a sauvé l'Europe, elle a été gagnée par des aviateurs et il désire aller les rejoindre.
Il écrit dans son journal personnel, trouvé dans ses bagages laissés à Londres :


"…..le sinistre jour de la capitulation, je me suis promis de remettre çà. Depuis ce jour-là, j'ai cherché un tuyau que je voulais sûr et rapide, pas moins, et qui m'est apparu sous les traits d'un grand jeune homme blond qui me le confia à la terrasse d'un café, à la Porte de Namur, en août 1941 " ( C'était le baron Jean Greindl, dit Némo, qui s'occupait du réseau d'évasion '' Comète '')


Le journal de Paul Henry, il y fait allusion dans une lettre qu'il écrivit à ses parents la veille de son exécution, le 31 mai 1943 à la citadelle de Liège. C'est un extraordinaire document que Rémy reproduit dans son ouvrage '' La Ligne de démarcation '' tome XII, sous le titre '' La dernière lettre ''.
Il y relate ses aventures depuis son départ de Belgique jusqu'au moment où il quitte Londres pour être parachuté sur le territoire occupé.
Il est écrit dans un style extrêmement vivant, avec un esprit d'observation très aigu et un humour parfois mordant. Il y décrit la France occupée, l'Espagne de Franco, Gibraltar et surtout le caractère britannique qu'il admire mais qui exaspère souvent sa nature bouillante et son impatient désir de se battre.
Paul Henri quitte Bruxelles le 6 février 1942 et arrive en Angleterre le 11 mars.
Il nous raconte d'une façon pittoresque son séjour à Gibraltar et son voyage à bord d'un paquebot polonais, le Sobieski, jusqu'à Glasgow.
" Ayant quitté Bruxelles le 6 février, j'ai mis trente-trois jours à gagner l'Angleterre, ce qui constitue une sorte de record. La plupart des Belges qui sont sur le bateau ont mis toute une année à couvrir le trajet !
Maintenant, me dis-je, finie la crainte des Boches et de leur Gestapo ! Finie la surveillance des Espagnols et l'appréhension d'être envoyé au camp de Miranda ! Finie l'angoisse d'être torpillé par un sous-marin ou coulé par une bombe ! Dans huit jours, pensais-je ce 11 mars 1942……J'écris ces lignes le 1ier septembre, je suis en Angleterre depuis près de six mois, et j'attends encore de savoir à quoi on va m'employer ! "
Après tout les contrôles de routine auxquels sont soumis les continentaux à leur arrivée en Angleterre, il séjourne à Patriotic School où son tempérament bouillant est soumis aux vexations d'interrogateurs méticuleux. Enfin le mardi de Pâques, il est reçu par les autorités belges. Une grande déception l'y attend car on lui confirme que la R.A.F. n'admet que des jeunes, repoussant férocement les hommes de plus de trente ans.
" Il est aussi indispensable de bien connaître l'anglais. Le meilleur pilote n'a aucune chance d'être admis s'il échoue à l'examen d'anglais.


Ayant plus de trente-six ans et ne sachant pas l'anglais, j'eus l'impression de recevoir une douche froide. Mais je me raccrochais à l'espoir que de nombreux camarades étant dans mon cas, il faudrait bien faire quelque chose pour nous.


Quinze jours s'écoulèrent sans que vint aucune nouvelle. Je flânai dans Londres, visitai les musées, allai au cinéma, me demandant à longueur de journée : mais combien de temps ce régime va-t-il durer ? Je ne suis tout de même pas venu ici pour me balader dans les rues. Un certain soir, je reçus un coup de téléphone de mon ami Fox ( surnom de Nicolas Monami ), qui m'avait peu à peu mis au courant de toutes ses activités secrètes en Belgique au cours de conversations sur le Sobieski et au Camberwell Institute.
Ecoute, lui avais-je dis, je ne vais pas en Angleterre pour moisir dans un bureau. Si les Anglais ont un jour besoin de moi pour une mission en Belgique, tu pourrais citer mon nom "
" Pourrais-tu passer me voir ? me dit Fox. J'ai à te parler de quelque chose d'important.
Quelques jours plus tard, j'étais mis par Fox en relation avec les autorités belges et anglaises qui s'occupaient de recueillir des renseignements en Belgique et détaché à la Sûreté le jour même où mes camarades de l'aviation, qui étaient toujours sans affectation, partaient pour Malvern. E me félicitai de n'avoir pas repoussé l'offre qui m'avait été faite par Fox. "
Paul Henry subit alors un court entraînement à l'école de parachutage du Service secret, où il saute deux fois d'un avion et une fois, de nuit, d'un ballon captif.
Il rentre à Londres le 8 mai 1942 et, alors, commence une longue attente, entrecoupée de cours de renseignements et de fausses prévisions de départ.


En Belgique.

Le 17 septembre vint l'heure de départ.
C'est dans les environs de Ciney qu'il atterrit et le jour même de son parachutage, il se rendit à Liège chez le capitaine Jean de Zantis. Ce dernier étant absent, il touche un autre pilote de son escadrille, Emile Witmeur.
Henry disposait d'un appareil de radio émetteur récepteur et devait créer un service de renseignements portant sur l'armée et la marine allemande, les dispositifs de la Luftwaffe et les objectifs à indiquer à la R.A.F., la situation économique du pays, le domaine industriel, la situation politique et l'évolution de la mentalité belge sous l'occupation.
Henry exposa à Witmeur le but de sa mission et lui demanda de recruter des gens à même de la remplir.
Fin octobre 1942, le service était établi et le travail commença.
Son principal adjoint, Paul Brouha, se spécialisa dans les renseignements militaires, emplacements de D.C.A., projecteurs, stations de radar etc…tandis qu'une partie de ses agents surveillaient le trafic par chemin de fer d'autres par bateaux.
Mlles Laurys à Bruxelles, Bounameau et Nols à Liège se mettaient à sa disposition pour les émissions radio et son logement.
Au début de 1943, les services de radiorepérage allemands s'intensifièrent.
Il aurait été préférable de ne jamais transmettre deux fois de suite du même endroit, d'autant plus qu'Henry devait parfois appeler Londres pendant 40 minutes avant d'obtenir le signal de réception. Mais il trouvait que le risque de se faire arrêter avec son poste en déplacement était plus grand que celui de se faire repérer. Il émettait trois fois par semaine de Liège, de Namur ou de Bruxelles.
Depuis la mi-octobre jusqu'à mi-février 1943, Brouha remit à Henry, deux fois par mois, une volumineuse documentation de renseignements, notamment sur les champs d'aviation de Florennes et de Brustem et des informations sur la mentalité de la population.
Au début de 1943, Henry dont la situation devenait précaire, car il avait été reconnu de plusieurs Liégeois, prépara son voyage de retour. Il était satisfait de la marche de son service et pensa à Brouha comme un de ses successeurs.


L'arrestation.

Le 18 février 1943, Henry de la Lindi est arrêté par la Geheime Feld Polizei, dans une chambre qu'il a louée rue des Célestines à Liège. Les Allemands ne savent pas eux-mêmes qui ils recherchent, car ils passent en revue les locataires de la maison. Enfin, comme ils commencent à inspecter les chambres et demandent s'il n'y a pas plus de locataires, force est à la propriétaire de dire qu'il reste un M. Hosselet. Les Allemands la poussent devant eux et ouvrent la porte de la chambre de Henry, qui est attablé devant son poste émetteur. Aussitôt arrêté, les Allemands saisissent tous les papiers, l'argent et le poste. Aucun élément ne permet de dire qu'il ait été dénoncé et il est fort probable qu'il a été repéré par ses émissions radio.
Au cours de l'instruction, il devra reconnaître certains préventions, d'autant plus que les Allemands détiennent son dernier message. Cependant, en ce qui concerne les noms de ses agents, il refuse de les donner. Pendant quinze jours on le torture mais ne dis rien.
Il donne le temps à ses agents de prendre le maquis. Quinze longs jours sans avoir été au rendez-vous. Ils doivent avoir compris.
Les documents découverts au domicile d'Henry permirent toutefois aux allemands d'identifier et d'arrêter successivement quatorze autres agents du service. Treize d'entre eux furent inculpés.
Le verdict du procès fut impitoyable. Henry et huit de ses coïnculpés furent condamnés à mort, trois furent acquittés, deux femmes furent condamnées à des peines de prison.


La dernière lettre.

Le 31 mai à deux heures du matin, de sa cellule il envoyait une dernière lettre non censurée :
" Bien cher Tous,
Je vous adresse rapidement ce tout dernier mot officieux par l'intermédiaire de l'aumônier qui nous assistera jusqu'au moment suprême. C'est un '' chic type '' en qui vous pouvez avoir toute confiance. Si vous voulez avoir des détails sur mes derniers moments vous pouvez demander son adresse à la Kommandantur de Bruxelles. Il se fera un plaisir de vous recevoir. Demandez l'aumônier des condamnés à mort.
Je joins à la présente lettre quelques souvenirs de ma dernière communion que je vais recevoir dans quelques minutes. L'heure de l'exécution est fixée à six heures , et mes camarades comme moi-même la voyons venir avec la plus grande sérénité. Quand nous aurons communié, nous serons fin prêts pour le grand voyage. Il n'a rien d'effrayant, au contraire. Nous avons tous la conviction qu'il sera pour nous un commencement et non une fin. Il ne faut pas vous tourmenter pour moi, ce ne sera même pas un mauvais moment à passer !
Je crains surtout que vous n'en souffriez plus que moi. Il ne faut pas, je vous assure que c'est peu de chose.
La " Banque "dont je vous parle dans ma lettre officielle se trouve naturellement à Londres….J'ai fait le nécessaire à Londres pour qu'on vous fasse parvenir mes bagages…..
Pour le reste, j'espère que vous me pardonnerez. J'ai fait tout mon devoir. J'ai joué le grand jeu, il faut savoir être beau joueur jusqu'au bout.
Je tremble surtout en pensant aux espoirs que vous aviez de me savoir sauvé. Il y a peut-être eu mal donne, mais on s'en apercevra trop tard. Nous ne serons fusillés qu'à sept sur les neuf. Priez pour que les deux autres soient sauvés.
Il est inutile de vous dire que je pardonne à tous ceux qui m'ont du mal, même à nos ennemis qui, en somme, n'ont peut-être fait que leur devoir, malgré qu'ils aient eu la main trop dure pour beaucoup d'entre nous. Vous voyez que je pars avec la plus grande sérénité, convaincu qu'avant cinq heures d'ici, je serai dans les bras du Seigneur, et que peut-être déjà je le prierai pour vous !
J'en arrive à mon tout dernier adieu que je vous adresse avec l'expression de toute mon affection
Pol.

A six heures du matin, après avoir entendu la messe et communié avec les six membres de son réseau dont le recours en grâce avait, comme le sien, été rejeté, le capitaine- commandant aviateur Paul Henry de la Lindi descendait dans les fossés de la citadelle de Liège en chantant le Magnificat.
Il tomba face au peloton d'exécution en criant :
Vive la Belgique ! Vive le Roi !


Source : Article de A. Crahay dans "20 Héros de chez nous", Editions J.M. Collet.
 
 
Note: 5
(1 note)
Ecrit par: prosper, Le: 28/05/11


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