Livre d'or

Par Johnny

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Rss Le Major IFM (Ingénieur de fabrication militaire) PAUL DUFOUR
L'Appel à 20 ans

Paul DUFOUR est né le 06 mars 1896 à MORLANWELZ (HAINAUT).
Le 04 août 1914, les Allemands envahissent la Belgique neutre; étudiant, il n'accepte pas de rester inactif alors que son pays est en guerre et n'a qu'un rêve: rejoindre au plus vite l'Armée Belge retranchée derrière l'YSER.
En 1916, à l'âge de 20 ans, sans rien dire à ses parents, il quitte la maison familiale, parvient à franchir la frontière néerlandaise, retrouve l'Armée et s'engage aussitôt comme volontaire.
Artilleur, il recevra sa formation sur le front, combattra avec le 1°Régiment d'Artillerie et terminera la guerre comme Maréchal des Logis.
Après la Première Guerre mondiale, Paul DUFOUR est détaché le 20 mars 1919 au Centre d'Instruction des Sous-Lieutenants Auxiliaires d'Artillerie. Le 16 décembre 1919, il est nommé Adjudant; le 26 mars 1920, il reçoit son étoile de Sous-Lieutenant et est désigné pour le 7°Régiment d'Artillerie. Cette mutation vers BRUGES marquera une étape importante de sa vie puisque c'est dans cette belle ville qu'il fera la connaissance de celle qui deviendra son épouse.
Après avoir été affecté au camp d'ELSENBORN, il est détaché le 16 septembre 1922, à l'Ecole Militaire en qualité d'élève de la
79°Promotion d'Artillerie et Génie.
Le 26 mars 1923, il est nommé Lieutenant et rejoint le 4°Régiment d'Artillerie Antiaérienne à ANVERS.



Le sous-lieutenant PAUL DUFOUR (a gauche sur la photo)




Ingénieur des Fabrications Militaires

Le 23 décembre 1927, il est désigné pour la M.A.E.(Manufacture d'Armes de l'Etat) afin d'y effectuer un stage de candidat Ingénieur des Fabrications Militaires.
Pendant ce stage, il suivra, à partir d'octobre 1929, les cours de l'année complémentaire à l'Institut Electrotechnique Montéfiore de LIEGE.
Le 27 février 1930, il entre dans le Corps des Officiers IFM.
Nommé Capitaine le 26 mars 1931, il se caractérise par ses capacités de travailleur acharné, ses connaissances approfondies de l'armement et devient un expert balistique réputé.
Il met tout en oeuvre pour donner une instruction de haut niveau au personnel technicien de la MAE : l'établissement est en effet chargé de la formation des armuriers et des maîtres-armuriers.
Le Capitaine IFM DUFOUR est choisi pour devenir Président de la Commission d'Examen : celle-ci doit faire passer les épreuves aux candidats maîtres-armuriers après une longue et très difficile période de formation.
A l'époque, Paul DUFOUR avait compris l'importance pour une armée moderne de posséder des techniciens en armement de première valeur. Dans ce domaine, il a accompli une oeuvre de très grande envergure et a largement contribué à donner au personnel de la MAE une très haute qualification.
Les maîtres-armuriers formaient d'ailleurs un Corps remarquable, qui était constitué en Fraternelle et qui apportait une aide considérable aux unités.
Le 26 mars 1937, Paul DUFOUR est nommé Capitaine en Premier IFM (Commandant). Il porte un grand intérêt au personnel de la MAE; ses contacts avec ses subordonnés sont très fréquents et il a le souci de guider les ouvriers, de les aider au maximum. D'ailleurs on vient régulièrement le trouver pour lui demander l'un ou l'autre conseil. Sa compétence est unanimement appréciée, tant à l'Etablissement de la rue Saint-Léonard qu'auprès des unités et de l'Etat-Major.
Il devient Sous-Directeur de la MAE (Chef des Services Techniques, du Service Contrôle et du Bureau d'Etudes) et participe aux travaux menés par différentes Commissions chargées de l'étude et du développement de l'armement. Son action dans ce domaine est particulièrement appréciée par l'Inspecteur Général de l'Infanterie, le Lieutenant-Général WIBIER, qui, le 27 juin 1938, lui adresse tout spécialement ses félicitations et ses remerciements pour "l'aide intelligente, sa grande puissance de travail, sa science, son inaltérable bonne volonté ..."
L'intérêt qu'il porte à l'armement et son souci d'être continuellement à la disposition des unités l'amèneront à de fréquentes visites dans les différentes garnisons et champs de tir, notamment à LOMBARDSIJDE (côte belge) où il conduit les essais de tir avec des mitrailleuses antiaériennes de 13,2 mm



A Lombardsijde le 6 mars 1940




La Deuxième Guerre Mondiale

Le 10 mai 1940, les Allemands envahissent à nouveau la BELGIQUE. Le personnel de la MAE, sous le Commandement de son Directeur, le Colonel IFM BERTRAND, quitte aussitôt LIEGE et, par GAND et BRUGES, par la route et en train, rejoint, non sans diverses péripéties, BRIVE-LA-GAILLARDE en CORREZE (FRANCE).
Pendant la Guerre 1914-1918, la MAE s'était installée à CALAIS et à BIRMINGHAM. En mai 1940, l'intention est aussi de poursuivre en pays allié les activités de soutien logistique et les réparations de l'armement léger au profit des Alliés.



Le cadre de la MAE à Brive-la-Gaillarde le 1er août 1940




Mais les événements vont se précipiter : la FRANCE est défaite fin juin 1940 et l'espoir pour la MAE de poursuivre la lutte contre l'Allemagne s'effondre en même temps que l'Armée Française. Le personnel reçoit l'ordre de rentrer en BELGIQUE.
Le Commandant DUFOUR rejoint LIEGE, le 24 août 1940, bien décidé à poursuivre à sa façon la lutte contre l'occupant.
Il a gardé intact son esprit combatif de la Première Guerre mondiale et cherche d'emblée, et par tous les moyens, à nuire à l'ennemi en rejoignant les mouvements de Résistance qui commencent à se constituer.
Il n'ignore pas que l'Allemagne a installé dès le début de l'occupation la G.F.P. (Geheime FeldPolizei), police secrète en campagne, axée sur le contre-espionnage et la sûreté et qui fera la chasse sans merci aux réseaux de renseignements et aux Résistants.
Et puis, il y a la Gestapo (Geheime Staatspolizei), nom aux consonances effrayantes et qui est chargée de la recherche et de la répression de tous les adversaires du Reich, qu'elle poursuivra impitoyablement dans tous les pays occupés.
BERLIN a d'ailleurs clairement fait connaître ses intentions par ses ordonnances qui introduisent en BELGIQUE le droit pénal allemand, donc la juridiction des Conseils de Guerre allemands : toute atteinte aux activités allemandes (acte de violence contre la Wehrmacht, espionnage, entrave au recrutement d'ouvriers au profit de l'industrie allemande, aide aux soldats alliés, etc ...) est passible du Conseil de Guerre, impitoyablement réprimée, le plus souvent par la déportation et la mort.

Sans peur et sans reproche

Début 1943, il entre dans un des meilleurs services de renseignements : BAYARD. Ce service a été créé en juin 1941 par deux parachutistes, Antoine JOORIS et Auguste DUBUISSON.
Son organisation est caractérisée par la décentralisation : les groupes de renseignement travaillent de façon tout à fait indépendante. Les agents se voient désigner un objectif qu'ils sont chargés de tenir à vue, de contrôler constamment.
Le pays est découpé en un certain nombre de secteurs entre lesquels les contacts sont inexistants grâce à une méthode de cloisonnement rigoureux.
Fin 1942, le réseau BAYARD a étendu son activité sur tout le pays. Chaque semaine les courriers des secteurs livrent les documents à la direction de BAYARD qui leur transmet les instructions à rapporter aux secteurs.
Un système de courrier par la FRANCE est établi. BAYARD transmettra même pendant tout un temps les rapports en provenance des services de renseignements néerlandais.
Cependant, malgré toutes les précautions, les arrestations par les Allemands décimeront les rangs du réseau : mais la mission sera poursuivie jusqu'au bout et les agents resteront fidèles à leur devise : "Sans peur et sans reproche".
L'utilité et la valeur des renseignements fournis par BAYARD ont été consacrées à de nombreuses reprises par des félicitations transmises par LONDRES.
Grâce à ses actions incessantes, Paul DUFOUR parviendra à recueillir et à transmettre un nombre considérable de renseignements de grande valeur pour les Alliés : identification des unités allemandes, mouvement des troupes, quantités et genres de chars, de canons, de véhicules, chargement et destination des trains ...
Tous les lundis, les renseignements sont dactylographiés par Madame DUFOUR et transmis par différentes voies à leurs destinataires : "on faisait le courrier pour l'ANGLETERRE".
Le réseau est également en contact radio deux fois par semaine avec LONDRES. Au mois de novembre 1942, détecté par la radiogoniométrie allemande, DUBUISSON est arrêté en pleine émission.
BAYARD transmettra également de nombreux courriers par pigeons parachutés d'ANGLETERRE.
Le réseau connaîtra un grand essor et comptera plus de 3000 membres, tous aussi courageux, malgré les arrestations, malgré la mort qui attend les agents pris par la Gestapo : ceux qui tombent sont aussitôt remplacés.
Le Commandant IFM DUFOUR participe aussi aux actions armées contre les installations de l'occupant.
On vient d'ailleurs le consulter de plus en plus souvent: il est un incomparable conseiller technique en matière d'utilisation de charges explosives. Il instruit les Partisans afin que leurs actions soient couronnées de succès, afin que les explosions provoquent un maximum de dégâts aux installations et au matériel de la Wehrmacht.

C'est un grand miracle que je n'aie pas abandonné tous mes espoirs. (Journal d'Anne FRANCK).

Mais Paul DUFOUR entreprendra une véritable croisade lorsqu'il constatera que l'ALLEMAGNE, manquant de plus en plus de techniciens de l'armement, tente de recruter le personnel de la MAE et de la FRC (Fonderie Royale des canons) pour le mettre au travail dans ses usines. Son mot d'ordre est impératif : "Pas une heure de travail pour les Allemands !".
Ceux-ci essaient d'abord d'attirer les spécialistes en leur promettant un travail bien rémunéré, du pain, des vêtements pour les familles restées en BELGIQUE.
Les sollicitations auprès des ouvriers qualifiés commencent en octobre 1941, puis la pression exercée par la Werbestelle (Office d'embauche) devient de plus en plus forte : le 06 octobre 1942, le travail obligatoire est imposé à tous les hommes de 18 à 50 ans.
Les Allemands n'essaient plus de convaincre mais utilisent la menace, les représailles, la déportation à l'égard des récalcitrants. Diverses Ordonnances suppriment les cartes de ravitaillement aux réfractaires.
Menacés par l'occupant allemand, les membres de la MAE retrouvent le réflexe qu'ils avaient avant la guerre : ils vont chez le Commandant pour y recevoir des conseils judicieux, une aide appréciée.
Il les dirige vers le maquis, leur procure de faux papiers d'identité, des timbres de ravitaillement, les fait entrer dans la clandestinité, bref, prend toutes les mesures pour les soustraire à la machine de guerre allemande, mais surtout à la déportation.
Sa maison au numéro 11 de la rue de la Justice à LIEGE devient un endroit de rendez-vous pour les Résistants, les membres de la MAE. Le Commandant DUFOUR prend de plus en plus de risques. On lui recommande de se réfugier dans la clandestinité, on lui conseille la prudence : "Pense à ton épouse, à tes quatre enfants". Bien sûr qu'il pense à son épouse et à ses enfants : Renée, 21 ans, Robert 13 ans, Simone, 10 ans et Marc 8 ans. Mais il ne veut en aucun cas ralentir ses activités contre l'occupant, cesser l'aide qu'il apporte au personnel de la MAE et de la FRC. "Si la gestapo vient m'arrêter chez moi, je m'enfuirai par les jardins", répond-il en riant ...
Il n'hésite pas à se rendre devant l'Office National du Travail chargé du recrutement de main-d'oeuvre, pour retenir le personnel hésitant.
Il se déguise même en fonctionnaire des Chemins de Fer et, coiffé du képi approprié, il se rend à la gare de LIEGE et à celle d'ANGLEUR dans l'espoir de sauver les quelques techniciens qui s'apprêtent à embarquer dans les trains pour le Reich.
Mais l'étreinte des Nazis se resserre inexorablement sur lui ...

Le 15 janvier 1944 ...

Le samedi 15 janvier 1944, à 6 heures du matin, alors que le Commandant IFM DUFOUR et son épouse se préparaient pour la journée, de violents coups sont assénés sur la porte d'entrée de leur domicile : c'est la Geheime FeldPolizei!
Un regard à son épouse et il se lance aussitôt vers le jardin ... où il tombe sur plusieurs soldats allemands qui l'attendent, l'arme pointée sur lui.
Arrêté, il est brutalement arraché à sa famille et emmené sur le champ par les sinistres gardes : il a juste le temps d'embrasser son épouse et de lui dire dans l'oreille : "N'oublie pas le 6,35". Il lui recommande ainsi de faire disparaître un pistolet qu'il avait reçu pour expertise balistique et qu'il avait soigneusement caché.
Madame DUFOUR, effondrée, reste à la maison sous la surveillance d'un garde armé : c'est alors qu'elle se rend compte de la présence de la machine à écrire ainsi que d'une partie du courrier avec des adresses de Résistants, de Réfractaires et d'autres documents contenant des renseignements importants sur les forces allemandes. Encore heureux que deux colis avec de très importantes informations confidentielles aient été livrées au vicaire de la paroisse il y a juste deux jours!
L'Allemand ne semble pas comprendre le français: Madame DUFOUR parvient à faire comprendre à son fils Robert qu'il doit se préparer à brûler les papiers compromettants.
Elle demande alors au soldat allemand l'autorisation d'aller chercher du charbon dans la cave pour recharger le poêle:
le garde accepte mais l'accompagne dans la cave où elle remplit lentement le seau ... Lorsqu'elle remonte, les documents ont disparu dans le poêle: son fils avait parfaitement compris la manoeuvre.
La perquisition qui aura lieu quelque temps après ne permettra plus à la G.F.P. de découvrir des informations sur la Résistance.
Happé par la monstrueuse machine répressive allemande, le commandant ne retrouvera plus jamais la liberté, ne reverra plus jamais sa femme et ses enfants. De bien cruelles épreuves attendent Paul DUFOUR et les siens.
Le Colonel IFM BERTRAND et les amis viennent aussitôt apporter leur réconfort à la famille éprouvée.
Le 17 janvier, Madame DUFOUR apprend que son mari est au secret à la prison Saint-Léonard.
Le 19, elle reçoit la visite d'amis, de Monsieur MOORS, secrétaire de la MAE, et d'un groupe de Sous-officiers et d'ouvriers qui viennent prendre des nouvelles de leur chef.

Dans les cellules de la Citadelle

Le commandant est bientôt transféré à la Citadelle, transformée en sinistre prison et où séjourneront tant de Résistants arrêtés par les Allemands.



Prison de "La Citadelle" à Liège




Madame DUFOUR reçoit de l'occupant un document rédigé en allemand et en français, qui précise notamment que le prisonnier peut recevoir des colis et de l'argent. Mais les Allemands ont barré les lignes autorisant l'échange de lettres entre l'Officier et la famille. Le document a été rempli au crayon par le commandant qui a indiqué le montant qu'il pouvait recevoir par quinzaine (100 francs), son numéro de matricule de prisonnier (n° 4236) et l'a signé.
La Citadelle ne se trouve pas loin du domicile de Madame DUFOUR. Le bâtiment est visible de la maison et on peut l'observer facilement puisqu'il se trouve sur une hauteur de LIEGE. Madame DUFOUR examine minutieusement chaque fenêtre à l'aide d'une paire de jumelles. Et puis, à partir de la fenêtre supérieure de sa maison, elle agite un drap blanc pendant de longues heures car elle se dit que son mari a peut-être la possibilité d'observer la ville entre les barreaux; peut-être voit-il sa rue, sa maison ?
Et effectivement, son émotion est grande quand elle aperçoit un drap blanc, accroché à une fenêtre de la Citadelle.
Les signaux qui deviendront quotidiens ne constituent qu'un fil très ténu entre les deux époux, mais Madame DUFOUR sait au moins que son mari est encore en vie.
Le 07 mai 1944, il n'y a plus de drap blanc à la fenêtre; il n'y a plus le moindre indice visible, même à l'aide de jumelles.
Quelques jours après, elle constate qu'un drap blanc apparaît à une fenêtre de la partie inférieure de la Citadelle; ce changement est durement ressenti car tout le monde sait que les Allemands réservent les cachots du bas à ceux qui vont être condamnés à mort et qui seront fusillés ou déportés!
Madame DUFOUR veut absolument améliorer ses contacts avec son mari, avoir des nouvelles de sa santé ...
Et puisque l'échange de courrier est interdit, elle trouvera un autre moyen. Elle prend un miroir et envoie des signaux lumineux sur la cellule; peut-être pourra-t-elle ainsi mieux communiquer avec lui ?
Mais il faut arrêter de suite les signaux par miroir : les gardes allemands sont intrigués et s'apprêtent à intervenir. Heureusement, un ami parvient très vite à faire parvenir à Madame DUFOUR un petit papier sur lequel il a rédigé un message laconique mais clair : "ne plus se servir du miroir".
Ce document renseigne aussi que "tout va bien, santé bonne", mais annonce une nouvelle inquiétante : "passera bientôt Conseil de Guerre". Madame DUFOUR marque la date sur ce papier, le jour où elle l'a reçu : "22-5".
Le bail de la maison est à échéance depuis fin avril 1944 : Madame DUFOUR trouve là une bonne occasion de forcer la garde allemande afin de demander conseil à son mari. Elle rédige vite un petit mot et se rend aussitôt à la Citadelle; peut-être pourra-t-elle le voir ? Mais la sentinelle accepte tout juste de prendre le message et de le porter au prisonnier.
La réponse est marquée sur le même document et le Commandant IFM DUFOUR y appose sa signature après y avoir ajouté "Bons baisers" : ce sera là le dernier message écrit qu'il pourra faire parvenir à sa famille.
Il y a presque 5 mois que Paul DUFOUR a été arrêté, 5 mois de cachot, de privations, de séparation.
L'échange quotidien de signaux par draps blancs se poursuit, mais, le 31 mai, il y a un brouillard tenace qui empêche de voir la Citadelle.
Les jours suivants, il n'y a plus de drap blanc ! On a beau observer toutes les fenêtres du bâtiment aux jumelles, il n'y a plus le moindre signal.
Qu'est devenu le Commandant IFM DUFOUR ?
Pendant de longs mois personne ne pourra répondre à cette angoissante question ... Tout au plus, certains prisonniers de la Citadelle parviennent-ils à faire savoir à la famille qu'il a été déporté en ALLEMAGNE.

Ami, si tu tombes ...

Dès que le Commandant est arrêté, la relève est assurée.
"Ami, si tu tombes, un ami sort de l'ombre à ta place ..." : telles sont les paroles du "Chant des Partisans".
Mais la famille DUFOUR donnera au texte écrit par Joseph KESSEL et Maurice DRUON un sens plus grandiose encore.
En effet, Renée remplace son père dans la dangereuse lutte contre l'ennemi, bien qu'elle sache que la famille est repérée par la Gestapo. Il est vrai que la jeune fille mène le combat contre l'occupant depuis le début de 1943: à 20 ans, comme son père pendant la Première Guerre mondiale, elle avait répondu à l'appel de son pays.
Elle portait en effet de nombreux documents sur la WEHRMACHT aux agents de la Résistance.



Renée DUFOUR, un visage juvénile, un tendre sourire qui cachaient une volonté farouche de combattre l'occupant




Elle reprend avec courage le flambeau tombé des mains de son père et redouble d'ardeur dans la lutte contre les Allemands. Elle dactylographie le courrier et acheminera un grand nombre de documents, de timbres et de l'argent qu'elle portera sur elle ou qui seront cachés dans les vêtements de sa soeur ou de ses frères. Les pantalons golf de ses frères sont d'ailleurs pratiques pour dissimuler quantité de papiers.
Elle franchira ainsi, avec le sourire, un nombre important de contrôles allemands: sa jeunesse, son assurance, sa foi inébranlable lui permettront de passer sans encombre au travers des mailles serrées du filet tendu par la Gestapo dans tout le pays.
Elle deviendra, elle aussi, membre du Réseau BAYARD.
Elle prendra les risques les plus grands en allant chercher un pilote américain, un aviateur canadien, qu'elle conduira au nez et à la barbe de l'occupant vers un autre rendez-vous où ils seront pris en charge pour une évasion vers l'ANGLETERRE. Elle les conduit au tram, tout simplement.
Elle demande aux militaires alliés de ne parler à aucun prix surtout quand le contrôleur vient vérifier les billets; la consigne ne sera pas toujours respectée par ces aviateurs parfaitement flegmatiques, et plus d'un Liégeois sera surpris d'entendre quelques mots d'anglais dans un tram bondé alors que l'on voit des uniformes Feldgrau dans les rues de la ville ... Nul doute qu'elle a souvent frôlé la mort.
En évoquant l'action valeureuse de Paul et Renée DUFOUR, on ne peut s'empêcher de penser à Walthère DEWE, grand Résistant liégeois tombé sous les balles allemandes le 14 janvier 1944 et dont les deux filles participaient également à la lutte acharnée contre l'occupant.

Adjudant de Renseignements et d'Action

Les services éminents rendus au pays par Renée DUFOUR à partir du 25 février 1943 ont été officiellement reconnus par le Ministère de la Justice le 03 janvier 1945.
De plus, la lutte courageuse qu'elle a menée pendant la guerre lui a valu d'être nommée Auxiliaire des Services de Renseignements et d'Action de Première Classe à la date du 01 mars 1944 (Arrêté du 04 juin 1948), puis Adjudant à la date du 01 mai 1944, c'est-à-dire à l'âge de 21 ans (Arrêté du 04 avril 1946).



Carte de membre de Renée DUFOUR à l'USRA




L'attente

Les mois passent sans qu'aucune nouvelle ne parvienne à la famille sur le sort de Paul DUFOUR.
Heureusement, Madame DUFOUR est entourée de l'affection de ses quatre enfants : Renée seconde admirablement sa maman.
Et puis, il y a tous les amis, les Officiers, le personnel de la MAE qui réconfortent régulièrement la famille ...
Le Colonel IFM BERTRAND et son épouse viennent un dimanche sur deux, rue de la Justice; les autres dimanches, la famille se rend au domicile du Directeur de la MAE.
Le débarquement en Normandie en juin 1944, la libération de la BELGIQUE et l'effondrement progressif des armées hitlériennes apportent les plus grands espoirs au Pays et en particulier aux familles qui ont un être cher quelque part en ALLEMAGNE.
Chaque jour, on pense au prisonnier, on prépare son retour au Pays, son accueil au foyer ...
Début 1945 : Madame DUFOUR reçoit une demande de renseignements émanant du S.G.A.R.A.(Service Général des Agents de Renseignements et d'Action) afin d'orienter les recherches; ce document sera également transmis à des milliers de familles comptant des prisonniers politiques.
Un jour, le Colonel IFM BERTRAND vient à la maison; son visage est grave; il annonce la nouvelle tant redoutée :
Paul DUFOUR a succombé aux terribles sévices qu'il a subis pendant de longs mois dans les prisons et camps de concentration nazis.
La pénible nouvelle vient de lui être transmise par le Ministère de la Défense Nationale le 05 mai 1945 .......

(Source: Article du Colonel F.GERARD in Bulletin du CLHAM (Centre Liégeois d'Histoire et d'Archéologie Militaire) n°5 Tome IV
 
 
Note: 3
(2 notes)
Ecrit par: prosper, Le: 19/07/12


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